Page 26 - Mouskhely papers - Face of Federalism
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sera en quelque sorte une véritable Cour de Cassation. Appelée à appliquer la constitution
et la législation fédérales, elle devra les faire respecter par toutes les autorités aussi bien
fédérales que nationales. Elle sera également juge de la constitutionnalité des lois fédérales
et des lois nationales par rapport à la constitution fédérale. Elle aura enfin à apprécier la
légalité des décisions administratives fédérales. Elle sera donc l’interprète souverain de la
constitution et des lois fédérales, en même temps que le juge de l’administration. Il lui ap-
partiendra ainsi d’assurer la suprématie du droit.
Est-ce à dire qu’à l’instar d’une cour de l’ordre judiciaire, la Cour Suprême doive se borner
à une application stricte et une interprétation littérale des dispositions constitutionnelles ?
Ce serait diminuer singulièrement l’importance de son rôle et se méprendre sur la portée
réelle de ses fonctions. Sa jurisprudence, s’appuyant sur des textes brefs et souples, devra
suivre pas à pas les modifications qui s’opéreront dans les conditions politiques et sociales.
Elle pourra de cette façon adapter la constitution fédérale aux réalités toujours mouvantes.
Dans cette œuvre d’adaptation continue, guidée par les principes fondamentaux du pacte
constitutionnel et tenant compte à la fois des droits permanents des États et des exigences
sans cesse croissantes de la Fédération, elle s’efforcera de rétablir constamment, par une
heureuse conciliation des intérêts en présence, l’équilibre indispensable au maintien de
l’union.
Gardienne de la constitution, la Cour suprême sera par la même le protecteur habile et
impartial du lien fédéral.
167.
Pour remplir ce rôle si délicat et si subtil, la Cour fédérale devra faire appel à des homme
d’une intelligence ouverte, animés d’un esprit sincèrement européen et d’une formation
juridique et politique éprouvée. Ses membres – au maximum onze – devraient appartenir,
comme à la Cour de Justice internationale, aux divers systèmes juridiques de l’Europe, si dif-
férents par leur conception et leur application du droit. Il faudrait notamment que les trois
principaux systèmes juridiques européens, l’anglo-saxon, le germanique et le latin, y soient
représentés.
Les juges seront choisis par le Conseil fédéral sur une liste de quatre candidats présen-
tée par chaque État après consultation des grands corps judiciaires, des universités et des
académies. Ils seront nommés par un décret du Chef de l’État après un vote favorable de la
Chambre des États. Le président de la Cour sera élu par les juges pour une période à fixer
(trois ans par exemple). À l’expiration de cette période, le président sortant pourra être ré-
élu. Tous les juges de la Cour, y compris le président, resteront en fonction jusqu’à l’âge de
70 ans. Une loi fédérale déterminera leurs garanties d’indépendance et d’inamovibilité, leur
statut et leur traitement.
168.
La Cour sera compétente pour régler tous les conflits des États fédérés entre eux et tous
ceux entre l’État fédéral et un ou plusieurs États membres. Elle connaîtra aussi des recours
formés par les particuliers, citoyens fédéraux ou même étrangers, contre les décisions ren-
dues en dernier ressort par les juridictions des États fédérés, lorsque ces décisions compor-
teront l’interprétation ou l’application de la constitution ou des lois fédérales. Elle statuera
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