Page 18 - Mouskhely papers - Face of Federalism
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CHAPITRE IV
L’Europe fédérée
Le Congrès de l’Europe, réuni à La Haye en mai 1948, a voté la résolution suivante : « Le
Congrès… demande que soit convoquée de toute urgence une assemblée européenne qui,
élue dans leur sein ou au dehors par les Parlements des nations participantes… recomman-
dera les mesures immédiates propres à établir progressivement, tant sur le plan économique
que sur le plan politique, l’unité nécessaire de l’Europe, examinera les problèmes juridiques
et constitutionnels, posés par la création d’une union ou d’une fédération, ainsi que leurs
conséquences économiques et sociales, préparera des plans à cet effet. »
Cette résolution, adoptée après de vifs débats, réclame la convocation d’une Assemblée
européenne, d’une compétence purement consultative, ayant pour mission de discuter et
de proposer un plan d’organisation constitutionnelle des États-Unis d’Europe. Il est en effet
nécessaire, pour fédérer les nations occidentales, de réunir une assemblée composée des
délégués de chacune d’elles et de la charger de rédiger un projet de constitution fédérale à
soumettre à l’approbation des États.
145.
Quels sont les considérations et les principes qui devront la guider dans son travail ? Si
elle veut faire une construction positive et durable, elle devra regarder en face les réalités
complexes et les obstacles redoutables qui se dressent devant elle. Elle ferait fausse route
si elle n’en tenait aucun compte, méprisait les obstacles et violentait les réalités. Les États
la laisseraient faire, mais par la suite ils n’hésiteraient pas à répudier son œuvre. Elle doit se
rappeler l’échec lamentable du Vor-parlament de Francfort qui en 1848 avait tenté en vain
de fédérer les États d’Allemagne. Elle devra surtout s’inspirer de la Convention de Philadel-
phie de 1787 qui a préparé la constitution actuelle des États-Unis d’Amérique. Composée
d’hommes remarquables tels que Georges Washington, Alexander Hamilton, Thomas Jeffer-
son et Benjamin Franklin, cette convention a réussi, tout en donnant aux treize États améri-
cains les apaisements nécessaires, à introduire dans son projet constitutionnel les germes de
l’extension actuelle du lien fédéral.
146.
La brièveté devra être le caractère premier de la constitution fédérale. Plus les textes
sont nombreux, plus ils apportent de restrictions aux droits de ceux qu’ils vont régir ; plus ils
sont détaillés, plus ils limitent l’exercice des droits reconnus. Une constitution fédérale trop
longue et trop précise se heurtera certainement à une opposition irréductible des États,
désireux de sauvegarder au maximum leur indépendance nationale, et ne pourra que faire
échouer le projet d’union. Il est préférable qu’elle soit aussi courte que possible. Ainsi elle
respectera davantage des réalités politiques, économiques et sociales ; au lieu de les figer
dans des formules desséchantes, elle les laissera évoluer naturellement, suivant le dévelop-
pement de la solidarité et de la communauté entre les peuples d’Europe. L’union qui repose
sur des sentiments et des besoins communs et qui implique des affinités spirituelles est le
résultat d’une adhésion volontaire et libre à quelques principes fondamentaux. Les textes
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